J'ai
construit de nombreux postes à galène durant mon
adolescence sans jamais me demander quel était le sens
de conduction de ce couple redresseur.
De nombreuses années après,
un renouveau d'intérêt pour ce genre de récepteur,
lancé par un membre du Club Informatique de Vaux-sur-Mer,
a éveillé ma curiosité sur ce point et j'ai
entrepris quelques comparaisons.
C'est bien dommage que je ne les aie
pas faites au temps de la grande vogue de la Galène ; on
trouvait alors des galènes dont on indiquait le type :
argentifère, arsenicale, sulfureuse, que sais-je encore.
Mais j'étais trop jeune, et d'ailleurs la notion de dopage
des semi-conducteurs était encore totalement ignorée.
Aujourd'hui, les rares échantillons
que j'ai retrouvés et ceux que j'ai pu me procurer grâce
à la complaisance de quelques internautes sont de type
inconnu. Nous les passerons en revue tout à l'heure.
Trois
types de comparaisons ont été effectuées
:
- Efficacité du redressement à haut niveau ( 250
mV ) et détermination du sens du courant.
- Efficacité du redressement à moyen niveau (25
mV ).
- Efficacité du redressement à bas niveau ( 5 mV
).
Appareillage.
Emission.
Evidemment, ces comparaisons auraient
pu être faites en relevant les caractéristiques de
la diode ainsi formée ; mais je n'avais pas les appareils
nécessaires. J'ai donc décidé de travailler
dans les conditions réelles d'emploi, c'est à dire
en détection d'une émission. Pour être maître
de celle-ci, j'ai construit un oscillateur à transistor,
travaillant en ondes moyennes, modulé en tout ou rien en
" signaux carrés " de fréquence 500 Hertz.
Il est en effet indispensable d'avoir une émission modulée,
afin de pouvoir chercher les points sensibles " à
l'oreille ".
Il n'y avait d'antenne, ni à l'émission,
ni à la réception et la distance et l'orientation
relative des bobines de l'émetteur et du récepteur
permettaient le réglage du niveau de réception dans
une très large plage.
Appareillage. Réception.
J'ai utilisé le poste à
galène construit lors du projet évoqué plus
haut ; la charge de la détection étant une résistance
de 4,7 kilo-ohms, simulant le casque de 2 fois 2000 ohms que l'on
utilisait autrefois, suivie d'un amplificateur.
Pour les essais à haut niveau,
cet ampli, de gain réglé à 4, passait la
composante continue et un dispositif de contre-tension à
la sortie transformait un voltmètre ordinaire en appareil
à zéro central.
Pour les essais à moyen et bas
niveau, l'ampli ne passait pas la composante continue son gain
était plus élevé et un redressement à
la sortie donnait, sur le voltmètre, une indication sensiblement
proportionnelle à la tension alternative d'entrée.
Dans tous les cas, un ampli audio, à
gain réglable, attaquant un haut-parleur, était
branché sur la sortie de l'ampli de mesure, pour permettre
la recherche des points sensibles " à l'oreille ".
Pour les comparaisons à haut niveau,
aucune tension auxiliaire de détection n'a été
utilisée.
Pour les comparaisons à moyen
et bas niveau, on cherchait le point sensible sans tension auxiliaire,
puis on essayait ensuite de voir si une tension continue réglable
ajoutée au signal améliorait la détection,
ce qui était généralement le cas ; on en
notait alors le signe et la valeur.
Deux " chercheurs " ont été
utilisés : l'un en cuivre, l'autre en nickel-chrome ; aucune
différence entre eux n'a pu être mise en évidence.
Constatation statistique, évidemment : il est impossible
de "piquer" le même point en changeant de chercheur.
Remarquons au passage qu'on a obligatoirement
deux contacts métalliques en opposition sur le cristal.
On considère que le contact de surface notable et sous
forte pression ( vis ou ressort du porte cristal ou alliage enrobant
le cristal ) est ohmique et n'intervient pas.
Echantillons
comparés
Un aimable internaute, monsieur Jacques
Chevalier, m'a envoyé, de sa collection personnelle, un
beau morceau de galène, deux morceaux de pyrite du Pérou
et un morceau de chalcopyrite de France.
Un membre du club Rétrophonia
a acheté à ce club, pour mon compte, des morceaux
de galène d'Espagne. Ces morceaux, assez volumineux, sont
visiblement destinés par leur conditionnement à
des collections de minéraux.
Un radioamateur m'a fait parvenir des
fragments de galène, que je désignerai " galène
F1 ".
Enfin j'ai retrouvé dans mes vieilleries
de petits fragments de galène, que je désignerai
" galène JR " et un " détecteur au
carborundum ", hors d'usage, que j'ai démoli pour
en retirer le minuscule fragment de carborundum serti dans un
manchon de laiton.
Les aspects des différentes galènes
sont très différents : cristallisation fine pour
la galène Chevalier, moyenne pour les galènes F1,
grosse pour les galènes Rétrophonia et JR. La pyrite,
d'une belle couleur dorée, présente des faces relativement
planes alors que la chalcopyrite est plus tourmentée.
Pour être sûr de la constance des conditions de test, il me fallait un détecteur de référence, sans recherche de " points sensibles ". Cette référence fut une diode à pointe au Germanium, prise au hasard dans un lot de démontage, qui se révéla un excellent détecteur.
Conduite des essais
Les essais sont relativement faciles
pour les cristaux présentant beaucoup de points sensibles
: c'est le cas pour la galène Chevalier, les fragments
JR et la pyrite du Pérou.
Ils sont longs et pénibles pour
les cristaux présentant peu de points sensibles : galènes
F1, chalcopyrite et surtout galènes Rétrophonia.
C'est pourquoi les essais sont parfois incomplets ; je demande
votre indulgence.
Je n'ai pris en compte que les meilleurs
points trouvés lors de l'essai ; il est possible qu'il
en existe de plus performants.
Essais à haut niveau
Le gain de l'ampli étant de
4, mais l'émission étant découpée
en signaux carrés, une tension de 500 mV à la sortie
correspond à une tension détectée de 250
mV. La tension de sortie est notée positive quand le courant
passe préférentiellement dans le sens pointe-cristal,
ce qui est le cas pour la diode Germanium.
Le couplage émetteur-récepteur
est ajusté pour que la diode Germanium donne une sortie
de 500 millivolts.
Tensions de sortie mesurées ( en mV )
Diode Germanium +500 Points
sensibles
Galène Chevalier --480
--500 --500 --500 très nombreux
Galène JR --400
--500 --500 --450 très nombreux
Galène F1
--350 --400 --320 --400 assez rares
Galène Rétrophonia +400
--350 +250
rares
Pyrite du Pérou ( a ) +400 +430
+420 + 440 très nombreux
Pyrite du Pérou ( b ) +400 +420
+430 +410 très nombreux
Chalcopyrite
+350 +330 +350 +360 assez rares
Carborundum +330
+370
Il est difficile d'apprécier la fréquence des points sensibles sur le fragment de Carborundum, la surface étant minuscule.
On
voit que la majorité des bonnes Galènes conduisent
du cristal vers le chercheur et que la conduction du chercheur
vers le cristal est la règle pour la Pyrite, la Chalcopyrite
et le Carborundum. Les rares points sensibles des Galènes
Rétrophonia conduisent, soit dans un sens, soit dans l'autre.
Lors des essais préliminaires,
j'avais observé sur la Galène Chevalier un point
à conduction positive, qui avait l'air aussi sensible que
la majorité à conduction négative ; je n'ai
pas pu le retrouver lors de ces mesures.
Essais à niveau moyen
Appareillage identique à l'émission.
A la réception, la chaîne
de mesure est réglée en sorte que 25 mV audio (500
Hz) à l'entrée donnent à la sortie une indication
de 2,5 V.
Le couplage émetteur-récepteur
est ajusté pour que la diode Germanium donne une indication
de 2,5 V en sortie.
Sur
une même ligne , nous indiquerons, pour un point donné,
la tension en sortie d'abord sans tension continue auxiliaire,
puis avec adjonction de la tension auxiliaire donnant la détection
optimale, avec indication de cette tension ( en millivolts ) et
de son signe. Celui-ci est le signe de la pointe par rapport au
cristal.
Volts Volts
Millivolts
Diode Germanium 2,5
Galène Chevalier
2,45 2,45
0
---------------------- 2,5
2,5
0
----------------------
2,35 2,45 --30
----------------------
2,2 2,35 +38
Galène JR 2,35 2,45
--29
-------------
2,45 2,5
--13
-------------
2,15 2,35 --23
Galène Rétrophonia
0,7
0,8 +30
--------------------------
0,95 1,3
--36
--------------------------
0,8 0,95
+55
Pyrite du Pérou ( a )
0,8
1 +13
--------------------------
1,3 1,6 +73
--------------------- ( b )
1,1 1,3
+27
Chalcopyrite 0,65 0,8 +61
Carborundum 0,55
1,3 +214*
------------------
0,25 0,9
+214*
*tension maximale que pouvait fournir notre dispositif
La tension auxiliaire qui améliore la détection est du sens qui augmente la conduction.
On
remarquera, sur la Galène Chevalier, deux points qui ne
sont pas améliorés par une tension auxiliaire, cas
très favorable pour un poste à galène normal
et aussi un point amélioré par une tension auxiliaire
positive : c'est un des points à conduction " pointe-cristal
" entrevus lors des essais préliminaires.
Les bonnes galènes sont peu améliorées
par la tension auxiliaire, dont on peut se passer sans problème,
ce qui a assuré leur succès incontesté comme
détecteurs.
Essais à bas niveau
Le mode opératoire est identique
au précédent, mais le gain de l'amplificateur est
4 fois plus grand, en sorte que 5 mV audio à l'entrée
donnent 2 V à la sortie.
Le couplage émetteur-récepteur
est ajusté en sorte que la diode Germanium donne 2 v en
sortie.
Même présentation des résultats.
Volts Volts Millivolts
Diode Germanium 2 2,15 +12
Galène Chevalier 1,95
2,1 --34
----------------------
1,92 2,1 --12
----------------------
2,05 2,07 --12
----------------------
1,75 1,75 0
---------------------
1,8 1,9 +22
Galène JR
1,95 2,05 --13
-------------
2 2,15
--37
------------- 1,8
2,1 --61
-------------
1,85 2,05 --29
-------------
1,95 2,05 --23
Galène Rétrophonia
0,4 0,7 --52
--------------------------
0,5 0,75 +61
--------------------------
0,5 0 ,78 --39
Pyrite du Pérou (a) 0,5
0,7 +84
------------------------
0,7 0,8 +48
------------------------
1,05 1,3 +42
--------------------- (b)
0,8 1,3 +87
------------------------
0,5 1 +109
------------------------
1,1 1,4
+64
Chalcopyrite 0,3
0,3 0
----------------
0,4 0,62 +112
Conclusion
La grande dispersion des résultats
provient du fait qu'il est impossible de retrouver le même
" point sensible " d'un essai à l'autre.
Cependant, le classement reste à
peu près le même. Les " bonnes " galènes
surclassent indéniablement les autres cristaux. Ce n'est
pas sans raison que la terminologie courante a été
" Poste à Galène ".
La surprise vient de la diode à
pointe Germanium, que je m'attendais à voir dépassée
par les galènes, surtout à bas niveau, et qui se
comporte plus qu'honorablement.
Aux
temps glorieux de la Galène, le bruit courait que l'on
pouvait remplacer, en cas de besoin, le cristal par un morceau
de pomme de terre. Je ne me rappelle pas si j'ai fait des essais
à l'époque.
Voulant vérifier le bien-fondé
de cette opinion, j'ai fait des essais en ce sens : tous ont été
négatifs, quel que soit le niveau, même très
élevé.
Sans doute n'ai-je pas utilisé
la bonne variété de pomme de terre